Développer la conscience phonologique est régulièrement difficile pour les élèves porteurs d’autisme. C’est pourquoi, il est important de penser l’entrée dans la phonologie comme quelque chose de très progressif et explicite.
Le premier contact avec la phonologie est classiquement associé à la découverte du son des lettres. Bien qu’à la base de la construction phonologique, cette étape est loin d’être aussi évidente qu’elle n’y paraît. Associer un son à un visuel de lettre alors que celui-ci est souvent déjà associé au nom de la lettre peut être perturbant et créer des confusions chez tous les élèves. Si à cette difficulté, on ajoute le fonctionnement sensoriel particulier de bon nombre d’élèves porteurs d’autisme qui peut mener à des difficultés pour analyser l’environnement sonore, on comprend mieux pourquoi cette entrée dans la phonologie peut s’avérer très complexe. Il est donc important de proposer des adaptations basées sur une approche explicite, visuelle et manipulable pour progressivement accéder aux sons.
L’association de supports visuels pour rendre plus explicite l’apprentissage du son des lettres
Comment exploiter la sphère visuelle pour accéder aux sons ?
Pour aider les élèves à identifier les sons ciblés, il est possible de les associer à des supports visuels. Dans cet objectif, je me suis intéressé à deux approches pédagogiques utilisées dans les écoles et exploitant l’entrée visuelle.
La méthode Borel Maisonny vise à introduire les sons des lettres en les associant à un geste. Cela permet de « vivre les sons » et d’avoir ensuite la possibilité de les retranscrire visuellement en représentant les gestes. Se concentrer sur un geste a l’avantage de faciliter l’implication de l’élève et donc son attention sur le son associé. Cette méthode peut également faciliter l’entrée dans l’association de deux sons (entrée dans la syllabique) en réalisant les gestes associés sur chacune des deux mains.
Les photographies des gestes proviennent d’une ancienne version de la méthode de lecture « Bien lire et Aimer lire » et les dessins de la méthode de lecture « Pilotis » :
La méthode des « Alphas » peut également être un bon moyen pour exploiter la sphère visuelle. Cette méthode proposée par les éditions Récréalire vise à introduire les sons des lettres en les présentant comme les moyens d’expression de petits personnages (les Alphas) dont les silhouettes rappellent celles des lettres en script. Petit à petit les élèves sont guidés vers les représentations simplifiées de ces personnages (le graphisme des lettres) sans toutefois les dissocier de leurs moyens d’expression. L’association du monstre et de son « cris » permet de faciliter l’association entre un visuel manipulable et un son.
Ces deux méthodes permettent donc d’exploiter la sphère visuelle pour travailler le sons. Dans mon dispositif, je préfère toutefois commencer par l’approche Borel Maisonny pour faire entrer les élèves dans la découverte des sons. En effet, la force de la méthode des Alphas repose sur l’attrait des personnages qui peut être à double tranchant. Leur côté très coloré, plein de détails et ludique est très attirant mais peut également être un frein à la visualisation de la forme globale de la lettre en raison de vision en détails de certains élèves porteurs d’autisme. Je préfère donc privilégier l’entrée gestuelle à vivre de Borel Maisonny de laquelle les élèves acceptent également plus facilement de se détacher. L’approche ludique des Alphas peut cependant s’avérer être un centre d’intérêt bien plus important que les gestes Borel Maisonny et ainsi mieux convenir à certains élèves.
Proposer des activités de manipulation des représentations des sons
Que l’on opte pour la méthode Borel Maisonny ou celle des Alphas, il est possible de transcrire le sons des lettres en entrées visuelles et en matériel manipulable. Ce matériel prend la forme d’étiquettes représentant les visuels associés aux deux méthodes.
En parallèle de la découverte progressive des sons par des jeux de gestes (Borel Maisonny) ou l’histoire des Alphas, j’utilise des bandes d’association à scratch pour manipuler les sons travaillés et ainsi favoriser leur ancrage. J’ai opté pour ce format de support pour sa facilité d’utilisation, son côté explicite (association directe) et sa nature structurante. Ces caractéristiques sont également favorable à une complexification de ces bandes dans un second temps.
Pour introduire les bandes d’association, les élèves n’utilisent dans un premier temps qu’un support à scratcher composé de deux lignes qui s’enrichit au fur et à mesure de la découverte de nouveaux sons.
Ce support peut être exploité selon les besoins de vos élèves et vos stratégies pédagogiques en variant les consignes d’association.
Associer le visuel des gestes Borel Maisonny aux visuels des lettres :
Associer les personnages Alphas aux visuels des lettres associées :
Associer deux graphies :
Pour télécharger la bande d’association et les étiquettes manipulables, c’est ci-dessous que ça se passe :
Bande association 2 lignes
Etiquettes lettres
Etiquettes Borel Maisonny
Etiquettes Alphas
Adaptation des « bandes d’associations » à la multiplication des graphies des lettres
Une fois les associations duelles maîtrisées, il est possible d’aller plus loin tout en gardant la structuration de l’activité. Pour cela, il suffit de proposer des bandes d’associations avec un plus grand nombre de lignes. Cela permet à l’élève de réinvestir la logique et le visuel de la bande d’association (on garde des repères !) tout en ajoutant une ligne pour introduire une nouvelle graphie. On peut travailler avec 3 lignes dans un premier temps avant de passer à des supports à 4 lignes permettant d’associer la représentation du sons et les trois graphies de la lettre (capitale, script minuscule, et cursive).
Bande association 3 lignes
Bande association 4 lignes
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